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Les quotas confirmés par d’ex-vérificateurs du fisc
Photo ben pelosseTrois ex-vérificateurs qui cumulent plus de 30 ans d’expérience ont brisé le silence sous le couvert de l’anonymat pour dénoncer des pratiques qu’ils considèrent comme étant de plus en plus abusives chez Revenu Québec.
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Trois ex-vérificateurs de Revenu Québec, qui cumulent plus de 30 ans d’expérience, disent que des quotas de récupération existent bel et bien au sein de l’Agence et que la pression pour les atteindre s’est accrue fortement au cours des dernières années.
Notre Bureau d’enquête a pu rencontrer ces trois anciens vérificateurs de Revenu Québec, il y a quelques jours. Sous le couvert de l’anonymat, ils ont accepté de parler de la pression qu’ils vivaient et du climat de travail qui, selon eux, s’est dégradé au sein de l’Agence.
L’un d’eux dit avoir été remercié après sept ans de services parce qu’il ne rapportait tout simplement pas assez au fisc. Dans son évaluation personnelle, il est d’ailleurs question d’un quota ou d’un objectif de 500 $ de l’heure.
«Les quotas, dit-il, c’est une réalité, mais ce n’est pas fondé. On ne peut pas savoir à l’avance si un dossier va rapporter 100 000 $ ou 200 000 $ ou 50 000 $, pas du tout.»
Un autre vérificateur dit qu’on lui a demandé de maintenir une cotisation, même s’il estimait ne pas avoir les arguments pour la justifier. «On m’a dit de pousser, et que le contribuable avait juste à contester.»
Ce même vérificateur dit aussi avoir déjà soumis un projet de cotisation à un contribuable sans qu’aucune explication lui soit demandée, juste parce qu’il y avait une anomalie apparente dans sa déclaration. Selon lui, Revenu Québec fait le pari que la plupart des contribuables ne contesteront pas, vu les coûts élevés d’un recours aux tribunaux.
Interdit de parler aux médias
L’identité de ces trois ex-vérificateurs a été authentifiée par notre Bureau d’enquête. Ceux-ci n’ont pas voulu parler à visage découvert, par crainte de représailles.
«L’Agence a le bras long, lance l’un d’eux, parti en 2014. Il y a des gens qui se sont fait vérifier et cotiser après avoir pris position contre elle.»
Une note interne datée de 2014 interdit d’ailleurs à tout le personnel de Revenu Québec d’accorder une entrevue à un journaliste ou de transmettre de l’information sur le fisc, «et ce, peu importe le contexte, le sujet ou les circonstances».
La question des quotas
Notre Bureau d’enquête a révélé une bande vidéo, en décembre dernier, où deux vérificatrices sont captées à leur insu. L’une d’entre elles dit qu’elle doit cotiser entre 1000 $ et 1200 $ de l’heure.
Une vérificatrice dit aussi avoir reçu un boni de performance exceptionnelle correspondant à 3,5 % de son salaire.
Les trois vérificateurs rencontrés jugent que cette conversation est loin d’être hors norme ou le fruit d’une «mauvaise compréhension» des politiques de l’Agence.
«La compréhension partout, dit l’un d’eux, c’est que les bonis sont liés à l’argent que tu vas chercher.»
- En décembre, le porte-parole de Revenu Québec, Stéphane Dion, a nié tout lien entre l’octroi d’un boni et les montants cotisés par un vérificateur.
Récupération fiscale en hausse
- 2010-2011 + 320 M$
- 2011-2012 + 750 M$
- 2012-2013 + 1,1 G$
- 2013-2014 + 1,4 G$
CE QU’ILS ONT DIT
Sur les quotas
«On a des statistiques. Chaque dossier doit rapporter 300 $ de l’heure [dans un projet spécifique]. On nous le dit que le dossier doit rapporter 300 $ de l’heure en moyenne.»
Sur le climat de travail
« En raison de pressions énormes, les employés travaillent chez eux [en plus des heures normales]. C’est une culture, une façon de faire très malsaine, en raison des pressions, des exigences et puis des quotas exigés.»
«Ça importe peu que le contribuable n’ait pas d’argent. Ça, c’est le recouvrement qui s’occupe de ça. Nous autres, on s’occupe pas de ça.»
Sur la culture de l’organisation
«Si vous osez faire des critiques, vous êtes un ennemi de Revenu Québec. Vous risquez de subir des conséquences.»
Sur les problèmes de recrutement
«Quand il y a une occasion, les [employés] laissent Revenu Québec pour aller à Revenu Canada, ça c’est clair.»
«À Revenu Québec, vous pouvez entrer avec un DEC (diplôme d’études collégiales) tandis qu’à Revenu Canada, pour [le même travail], ils vous demandent un bac.»
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